C’est ce qu’on lit, notamment, dans la lettre que le Parti d’opposition rwandaise en exil, Ishema Party, a adressée au président français, Emmanuel Macron , le 08 juin 2021. L’objet de la lettre était de présenter leur point de vue quant à la démarche de normalisation des relations diplomatiques entre le Rwanda et la France. C’est cette démarche qui a occasionné la mise sur pied d’une commission d’enquête sur les archives avec l’objectif de donner la lumière sur ce qui aurait été le rôle de l’état français dans le génocide de 1994. La conclusion de cette enquête annoncée est que la France a des responsabilités accablantes mais que rien ne prouve sa complicité. La sortie du rapport de cette enquête a été suivie par la visite de Monsieur Macron à Kigali.
“Tout en saluant cette volonté de normaliser les relations des deux pays après plus de deux décennies en brouille, notre parti considère que cette normalisation recherchée ne devrait pas se faire à n’importe quel prix”. Les leaders du Parti s’indignent du compromis apparent que les autorités françaises sont prêtes à faire pour gagner la confiance de l’état rwandais.
“En effet, le Rwanda reste champion de non-respect et de violation des droits fondamentaux des citoyens. Sans répéter le contenu des rapports des Organisations Non Gouvernementales internationales et des pays partenaires du Rwanda à l’instar des États-Unis d’Amérique, le régime de Kigali qui habituellement traitent les Hutus de citoyens de seconde classe, s’attaque finalement aux Tutsis qui se plaignent de cette injustice faite à l’encontre de leurs compatriotes Hutus. ” Et comme exemple, ils citent “le cas de Kizito Mihigo, le chantre assassiné dans sa cellule de garde à vue à Kigali est toujours d’actualité. Monsieur Karasira Aimable a été arrêté immédiatement après votre retour de Kigali comme si vous veniez de bénir en aval, cet acte de lâcheté.” se lamentent les dirigeants du Parti présidé par Madame Nadine Claire KASINGE.
“La normalisation des relations entre les deux pays, à notre avis, ne se traduit pas par la réouverture du centre culturel français et de l’ambassade à Kigali, mais plutôt par l’effort de pacification, de réconciliation profonde entre les Rwandais, quitte à assumer le rôle d’un garant des accords entre les belligérants. Cela est possible seulement si toute la vérité est exposée et si on cesse de voir les Rwandais dans le miroir victimes-bourreaux. Ici, la vérité sur ce qui est bien connu comme élément déclencheur de la tragédie au Rwanda de 1994 a une importance capitale. C’est ici que la France doit assumer sa responsabilité et inviter les autres pays à faire de même pour que cette vérité qu’on s’efforce d’ignorer soit reconnue et soit à la base d’un dialogue franc et sincère entre les Rwandais.”
Avant de clôturer leur lettre ouverte, les leaders du Parti demandent au président de résister fortement aux diffamations lancées contre les militaires de l’opération Turquoise, qui , selon eux , méritent une journée nationale en leur honneur.
“Les détracteurs et ennemis communs aux Rwandais et aux Français ont cherché à salir l’image de l’opération Turquoise et, au nom de la grandeur de votre pays, il vous revient de résister fortement à ces diffamations, rendre hommage aux troupes du Général Jean-Claude Lafourcade, en décrétant, à minima, un évènement annuel en leur honneur.”
Deux autres points importants son évoqués dans cette lettre, le génocide contre les Hutus et la justice pour le victimes des crimes du Front Patriotique Rwandais (FPR). Sur ce dernier point, une liste non-exhaustive de criminels suspects est présentée au chef de l’Etat français pour demander la coopération.
“Lors de votre conférence de presse à Kigali, vous avez aussi affirmé n’être au courant que d’un seul génocide. Que vous ne soyez pas informé du génocide contre les Hutus qui a débuté avec la guerre d’octobre 1990 et qui continue à nos jours, nous osons espérer que vous ne vous livrez pas à la bataille du négationnisme dont les conséquences vous poursuivront à jamais. Votre coopération pour que justice soit faite pour les victimes des crimes commis par le FPR vous ferait entrer dans l’histoire comme l’homme qui a milité pour la dignité humaine.”
L’intégralité de la lettre est accessible ci-dessous.