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Paul Kagame confiné !? Les Rwandais (se) demandent.

Où se trouve le président? C’est la question qui se pose de plus en plus. Pas de réponse, bien sûr. Car, dans un pays où le président pense qu’il ne doit rien à ses gouvernés, poser une question n’a qu’une seule issue sûre: les ennuis.

Malgré tout, au milieu de la pandémie comme COVID-19, l’incertitude oblige. C’est l’économiste David Himbara qui extériorise ce que 12 millions se demandent silencieusement. “Le Général manque à l’action au moment où le Rwanda a besoin de lui” s’insurge-t-il. Monsieur Himbara sait comment traquer le dictateur de Kigali. Localiser le Gulfstream du Général peut donner une indication. Effectivement, le Jet du général a atterri à Londres le 21 mars 2020 et y reste cloué.

David Himbara n’épargne en rien son ancien chef: “Dans d’autres parties du monde, les dirigeants donnent des mises à jour quotidiennes sur la façon dont leurs gouvernements luttent contre le coronavirus. Pas Kagame. Il est introuvable. Le général est absent au moment où le Rwanda a besoin de lui”. Et moi d’ajouter: Et s’il avait attrapé le covid-19 et que sa vie se détériorait? Il aurait pu nous le dire quand-même pour qu’on prie pour son âme!

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Une photo de lui avec Charles, le Prince de Galles est publiée. Or, le Prince Charles est testé positif au Covid-19. Les réseaux sociaux s’inondent de discussions sur l’état de santé de Kagame. Qui aurait contaminé l’autre, entre Kagame et Charles? Est-il confiné déjà ? Et sa famille, elle- est touchée aussi? Pas de réponse toujours. Quand la transparence est absente, on se cherche les réponses, les hypothèses se multiplient.

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Kagame dit qu’il a eu une conversation avec le Premier Ministre Canadien au sujet des mesures de combattre Covid-19. Le Premier Ministre le confirme par un communiqué. Kigali publie une photo des deux dirigeants, qui soulève plus de questions que de réponses. La photo aurait déjà été publiée le 10 juin 2018.

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En tout cas, la rencontre physique des deux dirigeants est la plus improbable car aujourd’hui Monsieur Trudeau est en isolement volontaire depuis que sa femme a été testée positive au Covid-19.  Dailleurs le 24 mars 2020, il a lancé un appel au monde entier :

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  1. Pourquoi Kagame ne s’est jamais adressé à la nation au sujet de la pandémie?
  2. Pourquoi Kagame voudrait nous faire croire qu’il est au Canada?
  3. Pourquoi le président rwandais obligerait les rwandais à privilégier le télétravail alors que lui, il doit se déplacer pour un simple entretien?
  4. Y aurait-il une autre raison( thérapeutique ou autre) qui impérativement pousse le président rwandais à voyager au milieu de la pandémie?

Bien sûr, comme je l’ai dit en haut de la page, quand la transparence est absente, on ouvre la porte aux suppositions diverses et aux rumeurs.

Où est Kagame ?

Chaste Gahunde


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Who is Yolande MAKOLO, the lady who called Kenneth Roth a “virus” ?

To understand Yolande MAKOLO, you need to know Jeannette Nyiramongi, wife of Paul Kagame. The two ladies’ stories are intertwined.

Jeannette Nyiramongi

She is the daughter of Mr. Murefu. Their family lived in exile in Bujumbura, Burundi when in 1983 Murefu was accused of spying on behalf of  the Government of Hayarimana in Rwanda. Mr Murefu was expelled to find himself in Kigali where he was well received. He started doing business. He ran a bistro and a nightclub in the center of the capital city, Kigali; in a building belonging to Matthieu Ngirumpatse, who was then president of the MRND, the political party under President Habyarimana’s regime. A rental guarantee check was deposited by Jean Huss Mugwaneza, a family friend, and a successful businessman. Mr Mugwaneza was the elder brother to Robert Kajuga, the famous leader of the Interahamwe.

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Robert Kajuga, leader of the Interahamwe

At that time, Jeannette Nyiramongi wass a young flourishing girl enjoying herself in Kigali. Jean Huss Mugwaneza offered to help her follow studies in Naïrobi, Kenya. Mr  Jean Huss Mugwaneza had a juicy market of supplying gypsum to the CIMERWA factory. Gypsum is a kind of rock used as a raw material for making cement. This stone was imported from the mountains of Kenya where Jean Huss Mugwaneza had opened mining sites. He therefore used to make frequent stays in the Kenyan capital, Nairobi.

How Makolo comes in

Despite Mr. Mugwaneza’s support, Jeannette Kagame fell in troubles. She was rescued and taken in by the family of a certain Speciose Kayihura, mother of Yolande Makolo. After a few years, from that family Jeannette Nyiramongi was introduced to her charming prince Paul Kagame who, in 1989, hastened the wedding arrangements before going to war.

Kagame conquered Rwanda in July 1994. He reigned as the strong man in Kigali and will be officially sworn in as president in 2000, making Jeannette Nyiramongi de facto the First Lady. Jeannette Kagame will not forget her benefactors, starting with the Speciose Kayihura family who sheltered her during the bad days in Naïrobi. This is how Yolande Makolo landed in President’s office as director in charge of the communications.

Nepotism at play:

Jeannette Kagame wants to keep control on everything, or at least , to have an eye in each corner of the State’s. As such , she places her cronies tactically ( in different times).

  1. Yvonne Makolo ( sister to Yolande Makolo) is CEO of Rwandair, the national  air company.
  2. Viviane Kayitesi Kayihura, chief of the Rwandan Development Bank (BRD), then posted to Ankara in Turkey;
  3. Teta Rutimirwa Kayihura, head of urban planning in the city of Kigali;
  4. Eugene Kayihura, Ambassador of Rwanda to South Korea, Tanzania and then to the Seychelles Islands;
  5. Tesi Kayihura, stationed at the Embassy of Rwanda in Singapore;
  6. Rema and Minego, board members of the government newspaper The New Times;
  7. Urujeni Manzi Bakuramutsa, current director of the office of Paul Kagame,  her mother is the sister of Speciose Kayihura, …

The father of Yolande Makolo is a Congolese man from Luba tribe (muluba). She is married to another congolese man, but not a less important one: Bosco Ntaganda’s brother. Bosco Ntaganda aka “Terminator”, was a henchman of President Paul Kagame in the Democratic Republic of the Congo (DRC) before being arrested and tried by the International Criminal Cout (ICC) in The Hague. He was sentenced to 30 years’ imprisonment for war crimes and crimes against humanity committed in Ituri in 2002-2003.

Power-drunk ?

Strengthened by her relationships with the first lady, Yolande Makolo has become, over the years, one of the most powerful women in “New Rwanda”. In her role as Director of Communication for President Kagame, she spearheaded  attacks on social media against Presidents Pierre Nkurunziza of Burundi and Yoweri Museveni of Uganda, who, – it is in the air- maintain not-so-good relations with President Paul Kagame.

Recently, Yolande Makolo has been replaced by another woman in the seraglio, Stéphanie Nyombayire, but she remains in power as responsible for “General Affairs of the Presidency of the Republic”. It is unclear as to what her post refers to, but we know that in this capacity she attacked Kenneth Roth, Director of Human Rights Watch, calling him “virus Ken Covid-20”.

KenHRW

It reminds me that  in Lexico the adjective “power-drunk” applies to a person intoxicated by the possession of power; rendered irrational by power.

Information from www.echosdafrique.com

Free translation and comments by Chaste Gahunde.


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Rwanda: Qu’est-ce qu’on nous cache sur Corona Virus?

Le monde entier est confronté à une nouvelle pandémie, Corona Virus (COVID-19) qui de plus en plus gagne du terrain. Plusieurs gouvernements prennent des dispositions plus ou moins appropriées et en adéquation de leurs moyens et capacités pour prévenir et protéger leurs populations. Mais toute prise de décision doit être basée sur les données et statistiques connues. La transparence dans la communication de ces informations à la population est vitale afin d’éviter, dans les mesures du possible, toute mauvaise surprise, et permettre une préparation psychologique. A voir ce qui se passe au Rwanda, l’on ne peut que douter de la capacité des dirigeants de faire face à ce fléau dont le potentiel dévastateur s’annonce très énorme.

Qu’est-ce qu’on ne nous dit pas?

  1. Tout commence par le manque de transparence sur la propagation du virus sur le territoire rwandais. Le premier cas est annoncé le 14 mars 2020 alors que l’ambassade des Pays Bas était déjà au courant depuis le 12 mars 2020.
  2. L’un des personnes atteintes travaillait à l’école Green Hills Academy (GHA) et que le nombre de ses contacts dans la population estudiantine reste inconnu. Il est indéniable que les étudiants sont partis avec le virus et qu’ils ont continué à le propager à leur passage.
  3. Visiblement, il n’y a pas eu de Task-force interministérielle pour coordonner les actions et anticiper les scénarios possibles. En effet, le ministre de la santé est absent, les communiqués étant signés au nom du ministère, alors que les ministres de l’intérieur, du commerce, et le Premier ministre signent en leurs propres noms!
  4. Quelques mesures ont été décrétées pour faciliter l’accès aux finances pour les hommes et femmes d’affaires et une enveloppe de 50 milliards a été rendue disponible à cet effet. Et que deviennent les autres secteurs qui seront affectés?
  5. Quelle mesure est prise pour les populations en promiscuité élevée? ( Les prisons, par exemple).
  6. L’ordre de rester chez soi est donné mais en même temps la démolition des maisons au nom de l’expropriation continue. De la folie ou l’intention de livrer les citoyens au virus!?

Qu’est-ce que vous nous cachez encore, et qu’est-ce que vous ne faites pas surtout?

Sans “Master Plan” pour faire face au Corona Virus, le Rwanda ordinairement fragile ne peut que s’attendre à des pertes énormes.

Contribution externe


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RWANDA : Kagame décide d’exposer son peuple au Corona Virus!

RWANDA : LE GOUVERNEMENT EXPOSE SA POPULATION AUX RISQUES DU CORONA VIRUS

Depuis le lundi 16 mars 2020, la ville de Kigali a repris l’opération de démolition de maisons dans les quartiers pauvres de la capitale pour laisser la place à de riches promoteurs immobiliers. Les propriétaires sont obligés de démolir leurs maisons sous la supervision des autorités locales, de la police et du célèbre DASSO (service de sécurité de l’administration du district). Les autorités locales embauchent des démolisseurs lorsque les propriétaires osent résister.

Les victimes en appellent à toute personne qui peut plaider en leur nom. Elles dénoncent le processus qui a abouti à la destruction de leurs maisons et accusent les autorités de « les vendre aux riches », violant les lois du pays, y compris la Constitution (article 34) qui stipule que la propriété privée, qu’elle soit la propriété individuelle ou collective, est inviolable. Le droit de propriété ne doit pas être empiété sauf dans l’intérêt public et conformément aux dispositions de la loi. Il doit y avoir une compensation appropriée.

Or, les autorités ordonnent la destruction de ces maisons sans compensation appropriée. Selon les dires de la population, elles ont procédé à une évaluation arbitraire des propriétés il y a trois ans, et n’ont jamais payé les frais d’indemnisation arrêtés. Les propriétaires sont sommés de déguerpir contre 90 000 francs rwandais (94 $ US ou 80 £ UK), supposés être un loyer de trois mois en attendant que des maisons soient trouvées pour les victimes. Cette somme est illusoire car elle ne suffit même pas pour un loyer d’un mois : la demande étant de loin supérieure à l’offre, les prix de location ont flambé.

Par ces destructions sauvages, des familles entières sont jetées dans la rue, en cette période de fortes pluies au Rwanda et où tout le monde doit prendre des mesures restrictives pour se protéger contre la pandémie de coronavirus.

De même, les enfants de ces familles sans abri ne peuvent pas aller à l’école et courent un risque très important de tomber malade à cause des conditions de vie.

Dans la vidéo ci-dessous, on entend une dame crier en disant qu’elle a 5 enfants, que le mari l’a abandonnée et qu’elle est revenue  de la République démocratique du Congo en tant que réfugiée tutsie sans aucun parent au Rwanda. Elle n’a pas d’autre endroit où aller sauf retourner en RDC.

Des informations plausibles font état des arrestations de personnes qui ont osé dénoncer cette barbarie auprès des journalistes. Elles sont susceptibles d’être inculpées en vertu des articles  de la Constitution qui condamnent la diffusion de fausses informations ou propagande susceptible de provoquer une opinion hostile au gouvernement (art. 194) ; de provoquer des soulèvements ou des troubles au sein de la population (art 204) ou d’entraîner des manifestations illégales (art 225).

Il est utile de souligner que par ces agissements, le gouvernement expose ces familles au risque de virus corona Covid-19 et aurait dû retarder cette opération qui ne requiert aucune urgence. En effet, il est cynique, voire criminel que le gouvernement rwandais puisse envoyer des familles entières errer  tout en donnant des directives de confinement à cause du corona virus.

L’on ne le dira jamais assez mais le gouvernement rwandais vient encore de dévoiler son vrai visage. Il a érigé l’injustice en mode de gouvernement et affiche le mépris total à l’État de droit et une inhumanité envers les plus vulnérables que sont les enfants, les mères allaitantes, les  personnes âgées.

Dans des interviews diffusées par des chaînes de TV en ligne, la population précise que les promoteurs immobiliers qui ont acheté le terrain sont représentés par un certain Karera  Dennis, ancien directeur de la police nationale, grand frère du ministre de la Justice Johnston Busingye et homme de main du président Kagame.

De fait, au lieu d’avoir de la compassion pour ces pauvres qui n’ont plus de logis, le président Kagame a donné une réponse qui laisse plus d’un pantois. Il a dit :

« En fait ailleurs, ils apportent des machines à chenilles «tinga tinga», des  bulldozers, ils soulèvent la maison et ses occupants et ils jettent le tout quelque part ». De là à lier cela aux dires des habitants lésés que la démolition vise également à tracer une route destinée à désengorger l’école privée Green Hills de la première dame, il n’y a qu’un pas.

Il n’est tard pas pour le gouvernement rwandais de se ressaisir et de réparer le plus tôt possible les torts causés à ces personnes qu’il a réduites au statut de sans-abris, sans parler de risques sanitaires auxquels il les expose.

Gaspard Musabyimana

Source: www.musabyimana.net 


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Sous Kagame, le Rwanda parmi les pays les moins heureux du monde!

C’est la conclusion du dernier rapport des Nations Unies,  “World Happieness Report” rendu public ce 20 mars 2020. Ce rapport est préparé chaque année depuis 2012. 

Avoir quelqu’un sur qui compter, un sentiment de liberté pour prendre des décisions clés dans la vie, la générosité et la confiance sont, entre autres, les facteurs utilisés par le rapport pour expliquer le bonheur d’un pays. 

C’est la Finlande qui bat le record (pour la troisième fois), suivi du Danemark en deuxième position, la Suisse est la troisième, l’Islande en quatrième position, et la Norvège se classe cinquième. Les places six à dix sont occupées par Pays-Bas (6), la Suède(7), la Nouvelle-Zélande(8), l’Autriche (9), et le Luxembourg (10).

Les Rwandais jugés moins heureux

Il est très rare que les rapports internationaux sur le Rwanda reflètent la réalité vécue sur terrain. Ceci est le résultat du travail dit de “soigner l’image du pays” , qui consiste à présenter aux enquêteurs des statistiques manipulées en vue de vanter le régime en place comme exemplaire. Il y va sans dire des millions de dollars versés aux lobbyistes pour promouvoir la personne de Paul Kagame en tant qu’ un leader extraordinaire. Ce rapport fait la différence.

Le Rwanda est classé quatrième moins heureux du monde sur 153 pays pris en considération pour ce rapport. Il vient après l’Afghanistan, le pays le moins heureux, le Sud-Soudan,  et le Zimbabwe. Dans les cinq plus moins heureux, la Centrafrique suit immédiatement le Rwanda.

Ce rapport casse le myth du leader visionnaire. Il est publié par Sustainable Development Solutions Network (SDSN). Le rapport est édité par le professeur John F. Helliwell (University of British Columbia); Le professeur Richard Layard, (Center for Economic Performance, London School of Economics); Le professeur Jeffrey Sachs, directeur du SDSN et du Earth Institute’s Center on Sustainable Development; Professeur Jan-Emmanuel De Neve, directeur du Wellbeing Research Center de Oxford University.

Chaste Gahunde


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Les Rwandais et leurs origines ethnisées

LES RWANDAIS ET LEURS ORIGINES ETHNISÉES
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Si la communauté internationale ne cesse de s’interroger sur l’histoire (ancienne et récente) du Rwanda, il n’en demeure pas moins que les Rwandais eux-mêmes se questionnent sur leur propre histoire, sur leur propre identité.

Peu d’écrits ont traité la question identitaire des Rwandais qui est pourtant une des causes de conflits récurrents de ce pays. S’appuyant sur des éléments précis, cet article apporte des pistes de réflexions sur les origines des Rwandais (hutu-tutsi-twa), sujets soumis à polémiques et dont on sait à quel niveau il alimente les crises rwando-rwandaises et même régionales.

Introduction

Le XXe siècle a été certainement le pire des siècles qu’a connus le Rwanda depuis son existence. On a vu une haine sans nom opposer deux camps nommés « ethnies » jusqu’à aboutir aux tragédies les plus sanglantes de l’histoire.

Le XXe siècle correspond, en effet, à la colonisation des pays africains par les Occidentaux. Rappelons pour le cas du Rwanda que celui-ci a été occupé d’abord par les Allemands (du début du XXe siècle à la première guerre mondiale) puis par les Belges jusqu’en 1962. Cette période d’une soixantaine d’années a beaucoup transformé le pays, par rapport aux modes de vie des Rwandais, aux mœurs et à la culture en général.

Si, au cours de cette période, le Rwanda a vu naître l’école, les hôpitaux, les routes, l’habillement moderne, la voiture, etc., il a aussi vu mourir sa religion traditionnelle, son organisation politique et sociétale, ses références symboliques, etc. Mon objectif n’est pas bien entendu, de comparer les pertes par rapport aux gains acquis grâce à la présence occidentale, mais de souligner la dégradation outrancière des relations qui existaient entre les Hutus et les Tutsis.

Personne ne peut oser dire que ces deux groupes sociaux n’existaient pas avant l’arrivée des Occidentaux et que les relations entre eux n’étaient pas déjà tendues. Néanmoins, tous les témoignages concordent en affirmant le rôle des colonisateurs dans l’attribution de critères naturels pour identifier ces deux groupes. En formalisant les différences naturelles, entre les Hutus et les Tutsis (et les Twas par ailleurs), les autorités coloniales appuyées par quelques anthropologues ont donc irréversiblement tranché. Les politiques coloniales et postcoloniales toutes confondues, en ont largement profité pour légitimer et consolider leur pouvoir, parfois au prix du sang du peuple rwandais.

Je voudrais revenir sur les erreurs qui ont été commises au début du XXe siècle, et sur l’une d’elles en particulier. En attribuant arbitrairement des origines géographiques différentes à ces deux groupes sociaux : hutu et tutsi, les classificateurs de l’époque venaient confirmer fatalement les différences et creuser le fossé au sein du peuple rwandais.

A l’heure actuelle, l’ethnisation des consciences ainsi que les événements vécus par les uns et les autres ont fini par catégoriser tout le monde, sans scrupule, fermant ainsi la parenthèse sur le vrai débat concernant nos questions identitaires, sources des tragédies cycliques qui ne cessent d’endeuiller le Rwanda.

Linguiste de formation, je voudrais, en m’appuyant sur les données linguistiques et sociolinguistiques fustiger l’idée aberrante selon laquelle les Hutus seraient seuls d’origine bantoue tandis que les Tutsis seraient d’origine chamito-nilotique.

Le but n’est pas, comprenez-moi bien, d’emprunter le sens inverse en établissant des liens fictifs entre les deux groupes ou plus encore de justifier les comportements actuels ou passés des uns vis-à-vis des autres. Tout simplement, je voudrais qu’on ne continue pas à être prisonniers des erreurs du passé, et que l’on cherche à comprendre l’histoire des Rwandais sans poser de critères discriminatoires au préalable.

Que lit-on sur le peuplement du Rwanda ?

Les premiers Occidentaux arrivés aux Rwanda se sont empressés d’écrire sur les origines des Rwandais. Plusieurs raisons justifient cet empressement :

– Les premiers Européens sont des explorateurs (Oscar Baumann notamment) qui cherchent à expliquer, avec des sources et des moyens bien entendu très limités, ce qu’ils ont découvert ponctuellement.

– D’autres sont des colonisateurs dont la politique « divide et impera diviser pour régner » est la devise (les colonisateurs devaient à tout prix trouver un point de chute pour installer l’autorité coloniale). Dans cette catégorie, ont peut aussi inclure les missionnaires qui adoptent la même politique pour asseoir et consolider l’Eglise.

– Une autre catégorie est constituée d’anthropologues européens de la fin du XIXème siècle et début du XXe siècle. On sait bien que les anthropologues européens étaient préoccupés par les classifications des peuples, notamment dans un rapport de domination « Blancs-Noirs ».

Sur le continent africain, les vieilles idéologies manichéennes veulent expliquer que les civilisations noires seraient l’œuvre des Hamites, peuples de race blanche qui seraient venus de la région caucasienne. Ces hypothèses dépourvues de tout fondement ont largement influencé les premiers européens qui ont travaillé sur les origines des Rwandais. S’appuyant surtout sur des aspects morphologiques de la famille dirigeante, ils ont tiré des conclusions généralisantes, comme on peut le lire dans différents écrits :

Le Père Pagès écrit :
« La communauté d’origine des Hamites avec les Sémites (Egyptiens ou Abyssins) semble hors de conteste. Leurs ressemblances physiques, leurs affinités des mœurs pastorales, l’identité de coutume, telles que la division en animaux purs et impurs (imiziro), la loi du lévirat, la mutilation d’un ennemi, leur organisation politique féodale), etc., sont autant de traits qui prouvent leur parenté avec cette race ».

Le Chanoine De Lacger a écrit quant à lui :
« Les Tutsis ont le type caucasique et tiennent du Sémite de l’Asie antérieure. Avant d’être ainsi négricisés, ces hommes étaient bronzés ».

Le Rapport sur l’administration belge du Rwanda-Urundi de 1925 décrit les Tutsis comme suit :
« Le Mututsi de bonne race n’a, à part la couleur, rien du nègre. Ses traits, dans la jeunesse, sont d’une grande pureté ; front droit, nez aquilin, lèvres fines ».

De tels écrits bien simplistes, polémiques et parfois manichéens ont été pourtant pris à la lettre. Les premiers intellectuels rwandais se les sont appropriés et les ont reproduits dans leurs ouvrages en langue locale. Ce sont ces livres qui ont servi à tous les niveaux de l’enseignement rwandais.

Monseigneur Alexis Kagame, un des premiers élèves de l’école européenne (notamment élève des Pères De Decker et Van Overschelde), ne pouvait que reproduire les théories en vogue, d’autant plus que cela ne le desservait pas en tant que membre de la dynastie nyiginya, fonctionnaire de la cour.

Quelle que soit la reconnaissance qui lui est due en tant que pionnier des travaux historiographiques et transcripteur des littératures orales de cour, on ne peut que regretter que les erreurs partagées par les Européens aient été enseignées et transmises de génération en génération par le biais de l’école.

Mgr Alexis Kagame affirme sans vergogne dans notamment « Inganji Kalinga (Tambour Victorieux) » son adhésion aux théories européennes, en localisant les origines géographiques des Hutus et des Tutsis. Ces derniers, Hamites, seraient venus, dit-il, de la région de l’Abyssinie (en Ethiopie). Les Hutus, poursuit-il, seraient arrivés en Afrique centrale en provenance de l’Asie. Mgr Kagame croit et écrit sans hésiter que les Tutsis étaient de couleur blanche (voir Inganji Kalinga, p. 65, p.71) et qu’ils se sont négrifiés par la suite.

Mgr Kagame Alexis est tombé, par certains de ses écrits, dans l’erreur manichéenne, utilisant des exemples souvent contradictoires et partisans. Toutes les critiques actuelles lui reprochent, à juste titre, de ne pas avoir su prendre de distance entre son travail scientifique et ses sentiments personnels. Il se met dans la mêlée et prend position contre ceux qui ne sont pas de son camp.

Hutu-tutsi : dénominations postérieures aux clans

Beaucoup d’écrits concordent à affirmer la primauté des clans rwandais sur les groupes sociaux hutu-tutsi. Ces appartenances ont été certainement créées après les débuts de la formation du Rwanda, c’est-à-dire après que la dynastie nyiginya, située aux environs de Gasabo, eut commencé à conquérir d’autres royaumes voisins (vers les années 1400). Avant et après cette conquête progressive, les membres des clans se mariaient entre eux, qu’ils soient de royaumes voisins ou lointains. Entre les rois voisins, le mariage interclanique était courant. Les exemples sont nombreux et à titre d’exemple : le roi Mashira[1] a épousé Nyirantobwa, fille de Mibambwe I Mutabazi[2]. Gahindiro, le fils de ce dernier (de la dynastie nyiginya) a peiné pour avoir Bwiza (la miss rwandaise de l’époque !!!), la fille de Mashira, roi de Nduga (du clan banda).

Du fait que les dénominations hutu-tutsi (et twa par ailleurs) n’existaient pas encore à cette époque du début de la formation du Rwanda, Mgr Alexis Kagame est bien confondu. Pour justifier la supériorité de la dynastie nyiginya et s’alignant ainsi sur l’idéologie européenne, il fait une hypothèse assez tendancieuse selon laquelle d’autres clans qui se mariaient avec les nyiginya étaient peut-être aussi des Tutsis. Voici ce qu’il écrit à la page 51 d’« Inganji kalinga » (Tambours victorieux) :
« (…) Qu’est-ce qui peut justifier que d’autres clans puissent se marier avec nos rois, si ce n’est que ces clans sont eux aussi des Tutsis ? S’ils ne sont pas des Tutsis, dis-moi comment un roi (Hinza) du Bushi ou de Buhunde peut-il oser demander une fille du roi du Rwanda et on la lui donne. Quel roi nyiginya peut-il s’acharner à aller demander une fille chez le roi hinza (si lui-même n’est pas de la même lignée) comme l’a fait Gahindiro de Mibambwe I ? »[3].

A cette époque les dénominations hutu-tutsi n’étaient pas créées et Mgr Kagame ne peut que formuler les hypothèses tendancieuses en attribuant ces appartenances aux clans, en fonction de ses propres tendances idéologiques.

On doit donc s’arrêter un instant et s’interroger sur cette présence de mêmes clans dans les trois groupes hutu-tutsi-twa lesquels sont des groupes sociaux et non des ethnies, dénominations postérieures à celles de clans. Sans parti pris, qu’est-ce qui empêcherait concrètement ces clans, partageant les mêmes ancêtres, d’être un même peuple[4] ayant les mêmes origines ?

Apports des éléments linguistiques

Toutes les sources orales dont nous disposons jusqu’à l’heure actuelle témoignent, depuis la nuit des temps, d’une même langue partagée par tous les clans rwandais et donc, par les trois groupes sociaux rwandais. Les éléments du code ésotérique dynastique tels qu’ils ont été intégralement transmis par les fonctionnaires spécialisés désignés de génération en génération par les rois successifs, et transcrits par Mgr Kagame, sont bel et bien en langue rwandaise (notamment le code dynastique « Ubwiru » ou la généalogie des rois nyiginya « Ubucurabwenge »). Or le rwandais (kinyarwanda) est une langue de la famille des langues bantoues, classée par les linguistes qui ont travaillé sur la classification des langues africaines. La dynastie nyiginya, de par l’usage du kinyarwanda et notamment dans son code ésotérique dynastique, est sans conteste de la famille des Bantous et non de celle des Hamites.

L’usage du kinyarwanda par tous les clans, avant même la naissance du Rwanda est un élément qui ne peut qu’affirmer l’hypothèse des mêmes origines. Les toponymes et les anthroponymes de tous les clans et leurs localisations géographiques tirent également leur source de la langue rwandaise, cela renforce davantage l’hypothèse d’une même communauté, ayant certainement les mêmes cultures.

Comment est-il possible qu’une dynastie d’origine abyssinienne n’ait pas laissé de traces de langues chamito-nilotiques dans son code ésotérique dynastique, qui l’auraient rendu plus ésotérique, plus protégé contre l’extérieur ? Certaines personnes prétendent que les nyiginya et d’autres clans (supposés tutsi) auraient abandonné leur langue pour adopter la langue des clans (supposés hutus et twas) qu’ils venaient de trouver sur place. Or, dès lors que les nyiginya étaient socialement, militairement, politiquement et économiquement plus puissants que d’autres clans, quelle raison auraient-ils eue d’abandonner la langue originelle ? C’est impensable. Supposons même qu’ils aient accepté de perdre leur langue, comment imaginer que ce soit au point de n’en garder aucune trace, ne fût-ce que pour le rituel ésotérique ?

Bref, la colonisation, l’exiguïté du territoire, la pauvreté dans un pays surpeuplé, sont autant de facteurs qui ont joué un rôle important dans la dissension des Rwandais. A chaque époque, le Rwanda a connu des divisions binaires qui consistent à désigner chaque fois les bons et les mauvais, ceux qui doivent être privilégiés ou pas (soi-disant par nature ou en raison de leur nombre minoritaire ou majoritaire). C’est incontestablement dans cette optique que les dénominations hutu-tutsi sont nées pour désigner les deux groupes sociaux à situations socio-économiques opposées.

Toujours dans ce mode de fonctionnement par exclusion, on a toujours assisté à des subdivisions binaires à l’intérieur même du système. Après l’indépendance jusqu’en 1994, on a connu une subdivision Kiga-Nduga avec des enjeux politiques et économiques conséquents. Pendant la période monarchique, on ne peut pas ignorer les querelles Nyiginya-Ega qui ont été la cause du coup d’Etat de Rucuncu.

Que faire des consciences qui ont intégré l’idée de groupes ethniques ?

La question fondamentale est bien celle-là. A l’heure actuelle et après ce que tous les Rwandais ont vécu, est-il nécessaire de leur dire qu’ils sont les descendants d’ancêtres communs et qu’ils sont plus proches les uns les autres qu’il ne le leur a été enseigné ? Certaines politiques ont essayé de tenir ce discours de l’unité originaire des Rwandais mais sans vouloir/pouvoir l’expliciter ni l’accompagner par des actes concrets.

A mon avis, il n’est jamais trop tard pour bien faire et les Rwandais peuvent toujours être accompagnés vers une vraie réconciliation pour le futur du Rwanda et de tous ses enfants, sans exclusion. Cela n’exclut pas en revanche le recours à la justice pour punir ou gracier tous ceux qui ont des comptes à rendre.

Cette réconciliation qui s’appuie sur l’unité originaire des Rwandais n’est peut-être pas la seule possibilité. Aujourd’hui, il y a des Rwandais qui prônent d’assumer leur hutuité ou leur tutséité, et de s’appuyer sur cette base pour se réconcilier et vivre en harmonie. Cela ne paraîtrait pas dérangeant, car de toute façon, les faits sont bien là : ces appartenances ont fini par s’imposer. Cependant, quelles que soient les pistes proposées pour arriver à la paix durable au Rwanda, il me semble judicieux de ne pas rester prisonniers des erreurs de jugement du passé car les éléments dont on dispose montrent plutôt que les Rwandais ne sont pas si différents les uns des autres !

Faustin Kabanza


Références :

– Kagame, A. : Inganji Karinga, Kabgayi, 1959, (2e Ed.).
– Kagame A. : Les organisations socio-familiales de l’ancien Rwanda, Gembloux, Ed. J. Duculot, 1954.
– Pagès, A. : Un royaume hamite au centre de l’Afrique, Bruxelles, Marcel Hayez, 1933.
– Vansina, J. : L’évolution du royaume rwanda des origines à 1900, Bruxelles, ARSOM, 1962.
– Delmas, L. : Généalogie de la noblesse du Rwanda, Kabgayi, Vicariat Apostolique du Ruanda, 1950

Sites internet :

http://audiovie.org/linguistique/
langues-africaines.htm
http://www.universalis.fr/encyclopedie/
nilotiques/1-origines-des-nilotiques/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ethnisme_
au_Rwanda///Article N° : 11664


Notes

[1] Supposé roi hutu du royaume de Nduga.
[2] Supposé roi tutsi de la dynastie nyiginya.
[3] Texte original en kinyarwanda : (…), ni iki cyatuma imiryango yabo ishyingirana n’abami bacu n’abo hakulya, atari uko n’abo bo hakurya atari abatutsi ? Niba kandi atari abatutsi, mbwira umuhinza wo mu Bushi no mu Buhunde waza gusaba umugeniku Mwami w’U Rwanda bakamumuha. Ni nde se wahihibikanywa no kujya gusaba umukobwa w’umuhinza utali imfura, nk’uko Gahindiro ka Mibambwe wa mbere yabigize ?
[4] peuple, en tant communauté vivant sur un même territoire, unie par des caractéristiques communes notamment la culture, les mœurs, la langue.


Source : http://africultures.com/